mural
lieu Fully
artiste Jasm One
œuvre ‘Julie & Alice’
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L’œuvre
Il n’y a pas si longtemps, la lessive se faisait aux lavoirs communautaires de nos villages. L’eau était précieuse et les tâches étaient réalisées collectivement.
Le foyer pour sénior Sœur Louise Bron à Fully vous réserve un trésor caché dans son arrière-cour. Vous y trouverez un espace à l’écart du temps, où l’ombrage des majestueux arbres et le loisir d’un banc vous invitent au détachement et à la contemplation d’une fresque émouvante.
L’œuvre ‘Julie & Alice’ fait échos à une photographie d’archive présente à l’intérieur de l’édifice. L’artiste Jasm One a pris le parti de faire revivre le souvenir personnel d’une personne anciennement résidente du foyer en y révélant toute la symbolique et la force de ce moment capturé. Par cette intervention Jasm One livre à la fois un hommage, un rappel et un message.
Cette fresque monumentale met à l’honneur les aînés et la mémoire collective, soulignant l’importance des personnes âgées et leur richesse de savoir souvent sous-estimée. Elle rappelle le passage du temps, les évolutions dans les habitudes de vie et le potentiel retour à des pratiques communautaires, notamment autour de la gestion de l’eau. Le message s’adresse aux générations actuelles, les incitant à apprécier la modernité tout en prenant conscience que rien est acquis. En effet, nul ne peut garantir l’abondance de l’eau pour les années à venir et le retour à des systèmes collectifs. Le boom des laveries automatiques dans les grandes villes illustrent ce retour à des modèles communautaires contemporains.
A travers cette scène, où le temps semble s’être figé et où le regard des personnages nous accroche inlassablement, l’artiste nous place face à l’humain et à toutes les valeurs que les personnages nous inspirent.
Une anecdote marquante de Jasm One accompagne cette création :
« En débutant l’œuvre, je n’avais comme information que la photo et tous les messages que j’y voyais pour raconter mon histoire. Je ne savais rien des personnages et je ne m’attendais pas à ce qui allait arriver.
Lors des premiers jours de réalisation, les villageois et villageoises se succédaient pour m’interroger sur ces deux femmes, sur le lieu et sur l’époque où aurait été prise la photo originale.
Pendant que certains venaient me questionner, d’autres venaient apporter des hypothèses.
Au fil des jours, l’histoire de cette image devenait l’énigme à résoudre pour tout un village.
Chacun y aller de ses informations, de ses croyances ou de ses hypothèses mais personnes ne savait…
jusqu’au jour où … Mme Ducret, une dame d’une soixantaine d’années s’est approchée de moi, les yeux trempés d’émotion et le cœur chargé de souvenirs réveillés.
Le silence est rompu par une voix frissonnante livrant un « MERCI, c’est ma maman ! »
C’est à ce moment-là que Mme Ducret me dévoile tous les secrets de cette photo.
Elle m’expliqua que le personnage de droite était « Julie », sa maman accompagnée de sa meilleure amie. Qu’elles avaient pour habitude de laver le linge familial ensemble à la fontaine du village. Que cette scène du quotidien eût été prise à Randonnaz, un village de commune de Fully qui a disparu après la seconde guerre mondiale pour laisser place à un alpage. Elle m’indiqua qu’à la période de la scène, Julie avait une petite sœur qui était aujourd’hui encore de ce monde. Elle compléta l’histoire en me disant que sa maman, avait eut 11 enfants, et que toute la fratrie était également toujours en vie. Mme Ducret me partagea les souvenirs personnels de la famille et cette rencontre improbable permit d’apporter toute la lumière sur l’histoire de cette image.
La magie ne s’arrêta toutefois pas là. Alors que je terminais les dernières retouches de l’œuvre, Mme Ducret me fit l’immense surprise de revenir me voir, accompagnée de la sœur de Julie, des dix autres enfants et des petits enfants. Les trois générations se sont rassemblés devant la fresque où leur sœur, maman et grand-maman est désormais immortalisée.
Cette journée et cette rencontre ont été un cadeau des plus précieux du fait que la sœur de Julie, doyenne de la famille, nous quitta quelques mois plus tard. »
Cette réalisation montre la puissance et la portée qu’une œuvre peut prendre dans mémoire et la vie actuelle d’un village.